Il lui prit la main, l'emmenant à travers champs. Son visage effleurait les épaisses tiges de maïs, plusieurs fois elle manqua de tomber pourtant elle riait à gorge déployée. Jamais elle n'avait été aussi heureuse, l'allégresse la transportait alors qu'il lui montrait, avec cette naïveté qui la touchait tant, un magnifique feu d'artifice. Les fusées coloraient le ciel, prenant la forme de fleurs, soleils ou d'étoiles filantes sous les « oh » et les « ah » de la femme. Lui, la regardait avec des yeux pétillants d'amour, pas tellement à ce qu'il faisait si bien qu'elle poussa un petit cri quand elle crut qu'il avait mit le feu au champs. Le cri se mua en un rire, il lui prit la main pour la rassurer, l'embrassa doucement alors qu'elle lui répondait avec passion. Ils regorgeaient de bonheur, à la maison leurs enfants dormaient d'un lourd sommeil sous l’œil protecteur de leur grands-parents. Ils s'offraient une escapade en amoureux, comme celles qu'ils faisaient du temps où ils étaient étudiants et, dans un dernier baiser, il lui proposa de terminer cette nuit à Londres. Quelques fous rires plus tard et les voilà à la capitale prêt à vivre pleinement ces derniers jours d'intimité. Il lui prit la main pour l'aider à sortir de la voiture mais elle le repoussa en riant, courant devant lui comme une jeune femme, l'invitant à la rattraper. Elle courait et il la regardait faire, amusé puis hilare quand elle bouscula un homme. Le visage désolé, elle s'excusait alors que ses yeux prirent une teinte apeurée. Il n'y eu pas un cri, ni même un geste, simplement un sentiment de peur qui gâcha son beau visage éclairé d'une lumière verte. Il hurla de douleur, se précipitant vers elle alors que le monde se mettait à tourner au ralenti. L'homme disparu pendant qu'il la prenait dans ses bras, la serrant fort contre sa poitrine.
Nous ne nous mêlions pas de vos histoires, nous n'avions aucun moyen de nous défendre, ne l'oubliez pas, les sorciers ne sont pas les seules victimes de la guerre.
Les moldus sont des sorciers qui s'ignorent
J'étais là à jeter des boulettes de pain sur ma frangine mais elle s'en moquait, elle était tellement plongé dans son bouquin que la maison pourrait bien s'écrouler, elle ne le remarquerait même pas. Aussi, faute de trouver une meilleur occupation, je lui ai arraché son livre des mains et l'ai lancé à Cora qui venait de rentrer. Olive se mit à hurler à la mort, Cora dribbla maladroitement, le livre perdit des pages et papa gueula qu'on devrait se calmer et que j'avais du courrier.
- C'est de qui ? Demandais-je en ouvrant l'enveloppe.
- Aucune idée, connaît pas.
- Ca dit que je suis un sorcier, que je dois aller faire mes études à... Poudlard... oh, y a même une liste de fourniture.
- N'importe quoi, les sectes sont en manque d'inspiration ma parole, allez jette moi ça.
- Mais papa c'est peut-être vrai ! T'as bien vu ce que j'ai fais à Poupy ! Et au match de Cora samedi ! Et puis y a aussi la télécommande qui a...
- BEN CA SUFFIT !
- Il se passe quoi ? Olive avait cessé de pleurer son livre mort au combat, la conversation étant à priori bien plus intéressante.
- J'ai reçu une lettre, je suis un sorcier frangine, fait gaffe.
- Cool, on va brûler Benny.
- Hein ?! On brûle encore les gens ?!!
- Mais n'importe quoi vous deux, bon Ben tu me mets cette arnaque à la poubelle et on en parle plus.
Il y eu une seconde lettre, puis une troisième, une cinquième, une quatorzième et des événements paranormaux à la pelle. Une vitre qui se brise quand je m'emportais, un objet qui volait, ce n'était que des incidents sans explications auquel mon père fut bien forcé de prendre garde. Intrigué et aussi exaspéré que nous lui demandions en boucle chaque matin « on va au chemin de traverse aujourd'hui ? », qu'il finit par nous y emmener. Le monde qui s'ouvrit à moi était incroyable. Magasin de chaudrons, de baguettes, des balais volants et des grimoires à foison. On se procura de l'argent, le dépensant à foison, je pris tellement de choses inutiles quand je n'eus pas les moyens de m'offrir un animal de compagnie. Papa était scotché, il harcelait de question chaque vendeur sur la sécurité de cette école, sur le fonctionnement des cours et sur la possibilité de la visiter. J'étais un touriste, mon père était en portes ouvertes. L'été se termina, nous nous rendîmes en famille au fameux quai mystérieux puis je montais dans le train, mon appareil photo autour du cou et une joie folle dans le ventre. Le trajet fut agréable, la balade en barque encore meilleur puis vint le moment tant redouté. Mes camarades du compartiment m'avaient parlé de la « répartition », des « maisons » et j'étais impatient de savoir où j'irais, surtout que j'avais parié tout mon paquet de chocogrenouille que j'irais à Poufsouffle.
« En voilà un garçon original, tu es curieux et Serdaigle te permettrait t'assouvir ta soif de savoir mais il y a en toi une volonté de bouger les choses. Tu es tout feu, tout flamme, tu crois à des vérités qui n'en sont pas et je devine que Poudlard renforcera tes convictions. Tu es encore naïf mais cela va changer et Gryffondor t'aidera à faire ressortir le courage qui se cache en toi, aussi, je déclare,
GRYFFONDOR »
Et zut !
*
- Oh dégage le sang-de-bourbe, c'est ma place.
- Va bouffer des vipères face de Mangemort.
- T'as dis quoi là ?! Ahaha ! C'est ça, cours vite Cassidy ! Tu pourrais pas te planquer longtemps !
Le choixpeau ne s'était pas trompé, à Poudlard je perdis bien des illusions et pourtant, était-ce la maison ou le caractère, jamais je m'y sentis mal. Aux insultes je répondais par des moqueries et sprints et, à l'exclusion des moldus dans le système sorcier, je choisi d'apporter la magie à même la maison. Moi, élève plutôt moyen jusqu'ici, je travaillais d'arrache-pied pour fabriquer des potions que j'essayais de rapporter en douce à chaque vacance. Je comblais mes frangines d'objets magique et jurait qu'un jour j'arriverais à ensorceler le chien pour le faire parler. Ma scolarité était un immense éclat de rire, je fus plusieurs fois puni pour avoir essayé d'ensorceler des objets, j'initiais des amis « sang-pur » aux délires de mon monde et entretenais une correspondance assidus avec mes sœurs. Toujours partagé entre l'univers des sorciers et celui des moldus, je me plaisais à marcher sur la ligne rouge, sautillant d'un monde à l'autre au gré de mes plaisirs. J'eus la chance d'avoir un père compréhensif et des sœurs formidables, même si l'acceptation de ma nouvelle vie ne fut pas toujours facile, je n'ai pas eu à me plaindre. Cora, une fille débrouillarde et très terre-à-terre, ne m'a jamais envié ma nouvelle vie, il lui a toujours semblé que la magie était un cadeau empoisonné. Par contre, Olive, m'en voulut pendant deux longues années, me boudant lors des vacances, son cynisme, ses méchancetés, motivés par la jalousie, s'entremêlaient à l'affection que nous nous portions si bien que je ne savais plus comment me comporter avec elle. Tour à tour nous étions inséparable et l'heure d'après nous étions comme chien et chat. Cela dura deux ans, jusqu'à ce qu'en troisième année je dus choisir mes options.
- A la rentrée faut que je prenne au moins deux option, j'sais pas quoi choisir, ça m'gave.
- Tu as quoi ? Demanda mon père en sortant le plat du four.
- Arithmancie, créatures magiques, divination, études des runes et études des moldus. A part créatures magiques et runes tout me tente...
- J'aime bien les runes, c'est comme un code secret. La petite voix fluette d'Olie me surprit, ne voulant pas la couper, j'étais suspendue à ses lèvres, attendant la suite. C'est mystérieux, intriguant... si j'étais à Poudlard, j'aurais pris ça.
- Alors je vais prendre runes !
- Bien sûr, t'es pas assez patient pour ça, tu vas pas y arriver.
- Olie, si je prends runes et que je t'envoie les cours, t'en dis quoi ? Tu m'aiderais ? Il y eu un silence, puis le sourire complice de ma sœur qui s'élargit alors que grand-mère s’exclamait :
- Si Olive prend runes, je prends arithmancie !
- Nan mais oh vous deux, j'ai droit de choisir mes options quand même ? Nous éclatâmes de rires pendant qu'Olive me soufflait une dernière demande, du coin de l'oeil je vis Cora lever les deux pouces en signe de victoire, après deux années caboteuses notre trio se reformait.
- Benny, tu voudras bien m'envoyer aussi les cours de botanique ?
Ma sœur n'était pas née sorcière mais de mon avis elle était la meilleure théoricienne qui soit. Je lui envoyais des résumés de mes cours et elle, de son côté, me renvoyait une liste de question à poser aux enseignants. Elle négligeait ses études réelles au profit de celles, rêvés, de Poudlard mais elle était tellement douée que je m'en foutais, je continuais à envoyer mes cours malgré les protestations de notre père. Olive avait décidé de laisser tomber sa jalousie pour faire de l'adage « si la porte est fermée, passe par la fenêtre » sa réalité, elle allait entrer dans ce monde interdit quoi qu'il en coûte. Quand on parle de nos avenirs, elle me répond qu'elle sera théoricienne des runes ou herboriste, dans les deux cas je sais qu'elle réussira, elle a un don pour ces trucs là.
Il me dit de vous serrer la main mais moi, j'ai envie de la bouffer, votre main
Le professeur parlait des sortilèges impardonnables, j'écoutais sans un bruit mais quand il expliqua le sort de mort j'eus un sursaut. Lumière verte, coup rapide... des échos du cours d'histoire de la magie me revinrent... le souvenir de conversations aussi... J'en parlais avec des amis, j'attendis avec impatience l'été pour interroger mon père... La vérité fut difficile à encaisser, ma mère n'était qu'une victime de la guerre comme il y en avait eu tellement, ce n'était même pas un dommage collatéral, juste une victime. Pourquoi les moldus n'avaient-ils pas été plus protégé ? Pourquoi n'avions-nous pas eu le droit à la vérité ? Si nos deux mondes fusionnaient, alors les sans magie pourraient se défendre. N'étions-nous pas assez important pour savoir la vérité ? Soit disant que cela entraînerait une guerre mais laissez moi avoir un doute, vous avez décidez seul de nous laisser dans l'ignorance et voilà le résultat !
- Ils l'ont tué papa ! Ils l'ont tué !
- Rubens calme toi...
- Non ! Ils l'ont tué ! Je vais leur faire payer, je vais retrouver le coupable et...
- Et tu vas rien faire du tout, ce qui est arrivé à Meredith est affreux mais te venger ne servira à rien. Elle n'aurait pas voulu ça, laisse le système s'en charger, il y a bien des juges et une prison chez les sorciers ?
- Oui mais ils n'ont pas tous été attrapés, Azkaban est bien, là-bas t'en ressors pas, ces salauds ils y perdent leurs âmes, c'est bien ce qu'ils méritent hein ?
- Non, pas vraiment. Si cette prison était plus douce, si elle leur redonnait de l'humanité au lieu de leur en voler, ils n'auraient pas envie de recommencer à tuer à la sortie. Leurs enfants doivent être bien malheureux, leur système n'a rien de correct Ben.
- Qu'est-ce que t'en sais, tu ne les as pas vu ! Tu ne les connais pas ! Ils sont dingues, ils sont...
- Ils sont des gosses, sorciers ou pas, ils sont comme les autres.
Ma mère était bibliothécaire dans une prison. Mon père m'a toujours raconté qu'elle croyait sincèrement que l'homme était bon mais que certains n'avaient simplement pas eu de chance. Que ce soit au niveau du code génétique ou de la vie, ils n'avaient pas eu de pot et pouf, ils étaient devenu des dingues. Elle adorait son métier, vendeuse de rêve et d'espoir, elle s'imaginait qu'avec ses livres elle allait empêcher les récidives. Je regardais mon père, je repensais à ma mère mais j'avais toutes les peines du monde à les croire. J'ai connus le rejet à cause de mon sang, j'ai écouté l'Histoire et appris des sorts qui l'aurait protégé... j'avais toujours crié haut et fort que nos mondes devraient s'unir mais c'était devenu encore plus évident. A défaut de venger ma mère, j'empêcherais que ça recommence.
*
- T'étais où ?
- Tu m'as fais peur ! Qu'est-ce que tu fous dans le noir ? Cora était assise sur mon lit, plongée dans la pénombre elle attendait, la lumière rougeâtre du réveil et ses 5h a.m pour seule compagnie.
- Pourquoi tu rentres si tard ? En plus tu pues la clope, t'as été faire quoi ? J'paries que t'as encore fait tes paris à la con avec d'autres crétins qui...
- Oh, ça va ! J'ai dis à papa que je dormirais ici, je dors ici, on a pas parlé d'heure et mince t'as pas ton mot à dire ! Qu'est-ce que t'as ? Madame à fait cauchemar et passe ses nerfs sur moi ?!
- T'as pas tilté, hein ? Toujours à glander, à faire tes magouilles dans ton coin et que je viens pour manger et que je profite de la télévision mais quand il s'agit d'être là pour ta famille y a personne !
- Putain Cece je comprend rien !
- Olive a pas arrêté de pleurer !
- Mais de quoi tu me parles bon sang ?!!
- Grand-ma' a Alzheimer !
Lentement je m'assis à côté d'elle et lui prit la main, elle se laissa faire, silencieuse, remplit d'une colère froide. Elle avait un rendez-vous cet après-midi, un truc de routine, sans gravité. On avait bien remarqué qu'elle était un peu agressive ces derniers temps mais il ne fait pas très beau et puis, on a tous nos mauvais jours.
- Elle a Alzheimer, Benny et ça ne se soigne pas. Elle va perdre la mémoire, petit à petit elle va tout oublier. Grand-père, maman, toi, moi, elle va tout oublier. Même le nom des choses... et après, ça va faire comme l'arrière grand-père de Ruth, elle va même pas pouvoir bouger. Elle va rester là, comme un poisson, à regarder le monde bouger avec de grands yeux vide. Il y eut un silence, que voulait-elle que je dise ? Mon cœur était serré, noué dans un étau, je ne voulais pas qu'elle me dise tout ça, je voulais aller réveiller grand-ma' pour qu'on joue encore une fois aux dames et que je perde. Que je la fasse rire ou pleurer, qu'on se dispute ou qu'on soit complice, n'importe quoi, je ne voulais pas écouter Cora et profiter de chaque seconde avec cette femme qui ne nous a jamais quitté depuis le décès de maman. Elle ne mérite pas ça Benny ! Il faut que tu fasses quelque chose !
- Qu'est-ce que tu veux que je fasse, je ne peux rien faire !
- Si ! Tu dois la soigner !
- Mais Cece...
- Soigne la ! T'es un sorcier bordel alors soigne la ! Emmène la dans ta Mangouste et soigne la ! Vous pouvez faire ça, vous ! Je ne t'ai jamais rien demandé Benny ! Quand tu as envoyé des cours à Olive, j'ai rien dis, quand tu m'as proposé d’intervenir dans mes problèmes j'ai refusé, jamais je ne t'ai jugé, jamais j'ai demandé un service. Tu me dois bien ça Rubens !
- Mais je ne peux pas !! Je ne sais même pas si j'ai le droit d'amener des moldus à Sainte-Mangouste !
- Alors prend le ce droit ! Crée le ! C'est injuste, sauve la, faut que tu la sauve... c'est injuste... elle fondit en larme dans mes bras qui, maladroitement, caressait son dos. Son frêle corps tressautait sous l'assaut de sa douleur, je ferma les yeux aussi fort que je pus pour ne pas mêler mes larmes aux siennes, tu as la magie, Rubens, un pouvoir et un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. J'eus un sourire, elle lâcha un rire étouffé mêlé de sanglot,
- Spiderman, vraiment ? Idiote...Promis Cece, je vais tout faire pour sauver grand-ma', tu verras, ça va aller, lui murmurais-je sans la lâcher.
Nous ne nous mêlons pas de vos histoires, nous n'avons aucun moyen de nous défendre et il est grand temps que cela change.